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    Au début de l'année, à l'occasion des voeux chacun souhaite à chacun la fin de cette terrible guerre car nous sommes vraiment trop malheureux. Le beurre et les matières grasses manquent. Des mères de famille recueillent la crème qui se dépose à la surface du lait afin de la tartiner sur le pain pour le petit déjeuner des enfants. A Préfailles l'afflux d'ouvriers du S.T.O, assignés à la construction des blockhaus et des ouvrages de défense du Mur de l'Atlantique, provoque un renchérissement de toutes les denrées. La farine manque, les prix deviennent prohibitifs. M.B., qui a toujours la répartie incisive et le verbe imagé, s'exclame :"L'argent fond comme beurre à la friture !" Pourtant toutes ses maisons sont louées, elle se félicite de sa récolte de cerises et ses "blanchettes" pondent assez d'oeufs pour sa consommation personnelle.







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  • 25 octobre 1942 - Les nuits précédentes les préfaillais ont été réveillés par des pilonnages, peut-être à Saint- Nazaire. Mais comment savoir quand les journaux restent muets ?

    9 novembre 1942 - Les B17 et B24 américains bombardent Saint-Nazaire et tentent de détruire le grand blockhaus (protégé par un plafond de 3,50 m de béton) qui abrite des sous-marins allemands. Pendant ce raid en plein jour, cent trente-quatre apprentis du chantier naval de Saint-Nazaire, des garçons de quatorze à seize ans, mal protégés par de simples tranchées, sont tués. Choc énorme pour la population du port. Et le pire est à venir...

    Désormais nul n'a le droit de venir ici  (à Préfailles) autre que de la zone côtière. Nous avons le droit d'entrer et de sortir, mais pas de recevoir. De plus, aux difficultés de ravitaillement s'ajoutent de médiocres récoltes, conséquence du froid. La pénurie s'installe, il faut faire la queue devant les magasins.

     

     

    Dans le déroulement de la guerre, 1943 semble être une année charnière. Tout au moins si je m'appuie sur les documents dont je dispose, soit presque exclusivement des lettre de famille. On devine à travers ces échanges épistolaires une grande lassitude, puis de la colère qui s'exprime de plus en plus ouvertement, enfin de l'espoir et de la peur mêlés. Chacun souhaite que ce conflit se termine tout en redoutant le prix à payer pour la liberté. Mais le quotidien devient insupportable : la pénurie s'étend à tout, le courrier circule de moins en moins bien, les bombardements s'amplifient, les jeunes sont rafflés pour le S.T.O, expédiés loin de leur foyer. La France gronde en sourdine.

    De son côté grand-mère, dans la Manche, n'avait aucun moyen de communiquer avec papa, au Maroc. Un jour de déréliction, elle a brisé et jeté au feu un portrait de son fils en criant : "Jamais je ne le reverrai !" A mon arrière-grand-mère offusquée par ce geste, la soeur de papa répondit : "Elle a trop de chagrin."

    Le rationnement

    Recettes de pénurie - 1940-1944

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    Pendant ce temps, qu'advenait-il de grand-mère ? Nous ne possédons aucun document écrit ou photographique de cette période. Et pour cause ! Mais nous y reviendrons plus tard. Ce que je sais, c'est que, après une vaine tentative de départ par Bordeaux, papa s'était engagé dans les tirailleurs marocains, à Valence. En août il avait embarqué à Marseille sur le De Grâce (ou Grasse ?) pour débarquer deux jours plus tard à Oran, avant de gagner le Maroc. Grand-mère et la soeur de papa résidaient-elles encore en Avignon ? Avaient-elles déjà trouvé refuge auprès de mon arrière-grand-mère dans la Manche, berceau de la famille ? Est-ce à cette époque ou plus tard que la petite maison qu'elle possédait dans l'Eure a été soufflée par l'explosion de bâtiments agricoles que les allemands ont fait sauter ? Ce sont des faits que nous avons entendendu raconter maintes fois, mais sans précision de date. Ou bien je n'y ai pas prêté attention...


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