• Le feuilleton hebdomadaire 42

     

    Le blog de la voisine (base)

     

     

    19 octobre 2010

     

    Il règne un climat néo-soixante-huitard depuis plusieurs jours. C’était ainsi. Des foyers de revendication s’allumaient et s’éteignaient, reprenaient ailleurs, un peu partout. Prémices de la folie incendiaire de mai 68 que les pompiers de l’Etat ne parvenaient pas à circonscrire.

    J’étais jeune, immature et tout à fait apolitique. Ces événements signifiaient surtout pour moi une grande fête de la jeunesse issue du baby-boom, et qui tenait tête à l’autorité parentale, laquelle se cristallisait en la personne du général. Nous étions soudain ivres de liberté –de toutes les libertés (Interdit d’interdire ! Clamait un slogan).

    Le collège (entendez l’internat jusqu’à la terminale) Sainte Escobille où j’étais scolarisée fut le seul du département à résister à la tourmente ! Aucun manifestant ne parvint à en forcer les portes et à entraîner la moindre élève. Ces dames, enseignantes ou surveillantes, toutes vieilles filles de bonnes familles, en tirèrent gloire pendant plus d’un lustre ! Les difficultés liées au ravitaillement les contraignirent néanmoins à fermer leur établissement. Ce qui m’autorisa à participer allègrement à plusieurs défilés.

    Nos parents avaient eu l’expérience de la guerre. Nous vivions mai 68 comme notre propre aventure. Certes, se détachaient des éléments très politisés qui savaient manier les idées et revendiquaient en faveur de causes mûrement réfléchies. En vrac, ils dénonçaient la vétusté des facs, s’opposaient au nouveau système de diplômes, à la guerre du Vietnam, protestaient contre l’extension de l’impérialisme américain, la montée du chômage. Pensez, la France qui venait de traverser dix années de prospérité ascendante, comptait soudain cinq cent mille chômeurs ! Du jamais vu !

    Il arrivait qu’à mon passage des messieurs d’âge mûr s’écrient en levant les bras : « Ah ! La jeunesse ! » A la différence d’aujourd’hui, elle abondait, la jeunesse, tant les survivants de l’apocalypse mondial avaient œuvré à remplacer les générations fauchées par la guerre.

    C’est grâce à mai 68 que j’obtins le baccalauréat. Cette année-là il n’y eut que des oraux. Et pour ce qui est de la parole, je me défendais bien !

     

    21 octobre 2010

     

    Au contraire de mon père enseignant en terminale, plutôt favorable à la vague contestataire, mieux valait ne  pas aborder la question qui fâchait devant mes beaux-parents. Mai 68 avait failli ruiner leur entreprise de poids et mesures. De plus, leur fille aînée, après avoir abandonné études et famille, avait suivi une bande de hippies déjantés au fin fond du Larzac. Puis, laissée à elle-même quand passa  le temps des fleurs, elle vécut dès lors d’expédients divers, aigrie, mauvaise, révoltée contre l’univers entier. Elle me déteste, ainsi que ses autres belles-sœurs. D’ailleurs, combien de fois l’avons-nous vue en près de quarante ans ?...

     

    22 octobre 2010

     

    Notre voisine du premier m’a fait part de sa préoccupation. Elle craint, si les choses s’enveniment, que nos pensions de retraite ne soient pas versées au début du mois prochain ; ou encore qu’il devienne difficile de retirer de l’argent liquide. Ma foi ce sont des éventualités qui ne m’avaient pas effleurée.

    Sébastien, qui s’inquiète d’être obligé de travailler jusqu’à un âge avancé, participe aux manifestations quand il le peut, en dehors de ses heures de travail.

    Les autres ne m’ont pas confié leurs états d’âme…

     

    N.B. Ceci n'est pas un journal intime mais une fiction.

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