• Votre feuilleton du week-end 11

     

    Le salon de thé (base)

     

     

    Semaine 11

     

    A la veille d’être licencié, il y a vingt ans, monsieur Mukaschturm avait été émerveillé en ouvrant ses persiennes par le concert des oiseaux au lever du soleil. Sans grande illusion quant à son avenir professionnel, il s’était dit : « Quoiqu’il arrive, cela on ne me le prendra pas. Si je devais tout perdre il me resterait au moins la contemplation de la nature. » Or, à quelques jours de là, ses parents lui firent la remarque que les oiseaux désertaient leur jardin.

          — Nous ne les entendons plus, se désolaient-ils.

        Mais si, affirma monsieur Mukaschturm qui avait l’oreille fine. Vous y faites moins attention, c’est tout.

    Cependant, de retour chez lui, il avait pris conscience que son père et sa mère devenaient sourds. Il en fut attristé. Il se rappela alors la vieille Gretel dont la tête se vidait jusqu’à ses souvenirs les plus personnels. Ainsi rien ne nous appartenait donc. Un jour nous pouvions tout perdre, y compris la mémoire de nous même.

     

    Aujourd’hui monsieur Mukaschturm pousse ses volets dès l’aurore, jamais lassé du chœur allègre des oiseaux à l’heure où pointe le jour. Epoux galant, le dimanche il honore sa femme d’un petit déjeuner au lit. Jamais il n’aurait imaginé s’implanter dans cette province lointaine.

     

    Il ne comptait plus ses mois de chômage lorsque sa fille l’avait invité à poser sa candidature au poste qu’elle-même venait de refuser. Non qu’il ne lui convînt pas. Seulement elle avait déjà accepté un travail dans une importante firme allemande. Il fit d’abord la grimace. Tout ce qu’elle lui proposait était d’accomplir une tâche de secrétariat, lui qui avait été contremaître dans une usine de textile. Sa candidature serait rejetée, c’était sûr.  Son gendre avait insisté. Il savait que cette entreprise avait besoin au plus vite d’une personne capable d’ordonner ses archives. Harcelé par tous, monsieur Mukaschturm avait fini par céder. Et il avait été embauché sur le champ. Il avait dû quitter son Alsace natale et s’éloigner de ses enfants. Pourtant il avait fait le bon choix. L’ambiance lui plaisait et il avait rencontré sa deuxième femme.

    Violaine était une secrétaire accorte qui approchait de la soixantaine. Son prénom avait intrigué Mukaschturm. Elle lui avait expliqué qu’il lui venait de sa grand-mère. Celle-ci, après avoir assisté à une représentation de L’Annonce faite à Marie de Claudel, avait été conquise par la pièce au point d’imposer le beau nom de la jeune fille Violaine pour sa petite-fille qui en était satisfaite !

    Cette discussion avait été une entrée en matière. Ils avaient sympathisé, puis s’étaient acheminés vers davantage d’intimité et s’étaient mariés enfin. Ils vivaient heureux à proximité de cette grosse maison de goût douteux qu’on appelait le château. On prétendait ses habitants hautains. Pour leur part ils ne l’avaient pas constaté. Ils prisaient plutôt la proximité de son parc et le calme du quartier.

     

    Grille


    Ce matin, au moment où monsieur Mukaschturm tourne l’espagnolette pour refermer la fenêtre une gracieuse silhouette se détache entre les troncs de la futaie. C’est Aude, la toute nouvelle épouse de Sébastien. Avec son arrivée la joie semble s’être installée dans la grande demeure. Elle ressemble à un elfe. Sa figure est sourire. Elle s’anime de toutes ses fossettes et rayonne. Dès qu’elle rit son visage est transfiguré. Une aussi radicale métamorphose attire et fixe les regards. La jeune femme serait orthophoniste et sur le point d’ouvrir un cabinet en centre ville, dit-on.

     

    N.B. Ceci est une fiction

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