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    Le salon de thé (base)

     

     

    Semaine 16

     

    Surprise ! Tout est bouleversé ! Du moins de ce que nous croyions en place, sur le point de se réaliser. Claude Roux en sera-t-elle déçue ? Ce n’est pas certain. L’essentiel pour elle n’est-il pas  d’avoir enfin des voisins pour réduire sa facture de chauffage ? Or, si le beau suédois n’a en définitive pas donné suite à son projet d’achat du loft d’Eric Bernard, les Tchang se sont montrés intéressés. Ils agrandiront leur appartement et les enfants disposeront chacune de leur chambre. Melle Hermenier en son for intérieur enrage de n’avoir rien su. Gageons toutefois que les parents Bernard ne souhaitaient pas le lui attribuer compte tenu de ce à quoi elle le destinait. Il y aura quelques travaux à prévoir pour faire communiquer les logements et supprimer l’une des deux cuisines. Pourvu que ceux-ci ne coïncident pas avec l’ouverture du salon de thé !

     

    Jamais Semaine Sainte n’aura été aussi chaude et ensoleillée que cette année ! N’était-ce la brièveté des jours, on pourrait se croire au cœur de l’été. Déjà les touristes affluent au centre ville que traverse la nationale. Ils s’arrêtent le temps d’un repas ou de quelques achats sans s’attarder davantage dans cette bourgade qui n’invite ni à la curiosité ni à la flânerie. Autrefois, dans des temps fort reculés, elle dut abriter, comme n’importe quelle cité, si humble fût-elle, un manoir et une église ou une chapelle dont l’emplacement même a été perdu. Sauf à s’égarer par inadvertance dans les ruelles tortueuses qui cheminent vers le vallon, personne n’aurait l’idée de pousser la promenade jusqu’à l’Hôtel Pochon que rien n’indique. Les antiques et nobles maisons se cachent loin, au plus profond de la verdure chatoyante. Tel est le cas de la demeure familiale de M. Dessablettes, transmise de père en fils ou d’oncle à neveu depuis plus de deux siècles. Peu d’étrangers sont invités à y pénétrer.

    Melle Roux, en qualité de membre actif de l’association Arts et Sciences, a eu ce privilège,une seule Fenêtrefois. Des piliers de tuffeau coiffés de feuilles de zinc indiquent le départ de l’allée dont les méandres disparaissent derrière les taillis. Le manoir occupe une clairière à l’abri des regards. C’est une grosse maison d’aspect plutôt quelconque, hormis une fenêtre à meneaux qui en orne la façade.

    A l’intérieur, comme figés sous les strates des générations, objets et livres s’accumulent sur les tables recouvertes de lourds tapis brochés, au hasard des emprunts et des abandons. La porte surmontée d’un arc en accolade, à droite de la cheminée, reste close sur l’intimité familiale. Les reliquats des héritages successifs encombrent la vaste pièce. Mais ce désordre chaleureux ajoute de l'âme à la vieille bâtisse.

    Derrière la gentilhommière une porte vitrée donne sur le potager où l’on devine, au milieu des planches de légumes et de fleurs, deux carrés de simples. Les Dessablettes prétendent que l’ancien puits, dans l’angle nord-ouest du jardin, cacherait en réalité l’ouverture d’un souterrain aujourd’hui en partie effondré. Mais les histoires de galeries secrètes pullulent dans les lieux sans âge…

     

    N.B. Ceci est une fiction

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    Le salon de thé (base)

     

     

    Semaine 15

     

    Sur le point de refermer les volets intérieurs de la chambre d’amis, Alice remarque la tête penchée vers le sol de Melle Hermenier qui longe les murets de son jardin en terrasse. Cette rapide observation dénuée d’intérêt l’incite d’ailleurs à terminer sa tâche au plus vite. Dans le même temps, derrière la fenêtre de sa cuisine, Violaine Mukaschturm se demande ce qui intrigue leur voisine. Aude Launay, bien qu’elle se hâte vers son cabinet d’orthophonie, ne peut s’empêcher de se retourner sur la silhouette courbée qui va et vient dans le verger. Sans doute Melle Hermenier a-t-elle perdu un objet dans l’herbe… Mais il fait si beau. Bientôt la brume matinale se lèvera et chacune  se préoccupe déjà de profiter au mieux de cette belle journée en perspective.

     

    Comme l’avait prévu Alice Vergnaud, en dépit du soleil, sans chauffage sa petite maison d’Oléron devenait glaciale à la tombée de la nuit.  Aussi proposa-t-elle à Tatiana (qui s’était révélée d’agréable compagnie) de venir passer quelques jours chez elle. L’une et l’autre aspiraient surtout à la paresse et à l’évocation de lointains souvenirs de jeunesse. C’est pourquoi, hormis une journée sur les bords de Loire, elles sortirent peu. Tatiana profita cependant de cette excursion pour faire le plein de photos en prévision de ses futurs articles sur son blog. Parce que ELLE persévère. Le projet d’Adèle Hermenier lui parut tout à fait passionnant. Peut-être cette dame accepterait-elle de mettre en vente plusieurs de ses photos d’art ? Au moment de se séparer, Tatiana promit à Alice de revenir après l’ouverture du salon de thé, en mai ou juin.

     

    Car les événements se précipitent. Son fils a ramené Mme Hermenier chez sa fille. Certains en ont déduit sur l’heure que les travaux étaient achevés. Mais surtout, il y a quelques jours, chaque résident a trouvé dans sa boîte à lettres une carte illustrée ainsi libellée :


    Invitation à l’inauguration du salon de thé

     

    Nous avons l’honneur de porter à votre connaissance l’ouverture d’un nouveau salon de thé/galerie d’art dans le cadre de l’Hôtel Pochon. Nous vous proposons thés divers, chocolat, café, jus de fruits, ainsi qu’une large variété de tartes. Vous pourrez dès l’entrée admirer les œuvres de jeunes artistes prometteurs. Notre salon de thé porte l’enseigne CHEZ ADELE H. Nous aurions grand plaisir à vous voir parmi nous pour la fête de l’inauguration le SAMEDI  7 MAI 2011 à partir de 15 h.

    Je vous prie de croire à  l’assurance de ma considération distinguée.

                                                              

                                                                                                                                                  Adèle H.


    Un bref mot amical de la main de Melle Hermenier complétait le texte. Ce qui donna à tous le sentiment d’appartenir à son cercle.

    Par chance, il n’est prévu aucune enseigne lumineuse ou autre qui aurait défiguré le cadre bourgeois de la propriété du 19e siècle. Seules deux plaques assez discrètes seront apposées au dernier moment sur l’un des piliers du portail et à l’entrée du bâtiment. Melle Hermenier compte davantage sur ses relations et le bouche à oreille que sur une publicité tapageuse.

     

    Ce samedi est le premier jour des vacances de printemps. Bertille et Philippe Tchang n’ont pas tardé à s’échapper de la maison pour se précipiter dans les fourrés en contrebas.  Elles sont remontées en criant à leur mère qu’une chatte sauvage cache une portée dans un trou du mur.

     

    N.B. Ceci est une fiction

     

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    Le salon de thé (base)

     

     

    Semaine 14

     

    PersiennesCertain jour en revenant de faire ses emplettes au centre ville, Claude Roux remarqua une hirondelle qui voletait d’un toit à l’autre tout au long de la rue. Une seule, dit le proverbe, ne fait pas le printemps. Celle-ci entraîna l’été dans son sillage. D’un coup le thermomètre a grimpé et le soleil a chassé tous les nuages. Les fenêtres se sont ouvertes derrière les persiennes à demi tirées en plein midi. La grande maison a pris un aspect riant. Claude Roux, Alice Vergnaud, Adèle Hermenier, Aurélie Tchang ont déposé des potées sur les rebords des fenêtres, les balustrades ou le long des terrasses. Les premières mouches bourdonnent dans la fraîcheur des intérieurs d’où l’on perçoit les rires et les conciliabules de la rue.

    Ce jour-là Claude fit la connaissance de son futur voisin, un grand bel homme d’environ trente-cinq ans. Un suédois qui ne parle pas un mot de français. Il se présenta. Claude lui fit répéter plusieurs fois son nom mais, en dépit de sa bonne volonté, elle ne comprit rien. Et ce fut réciproque. Ils en rirent. La présence de Varech leur offrit un dérivatif. L’homme essaya l’anglais :

        He is so nice ! Is he shy ?

    Claude ne garde que de vagues notions de la langue de Shakespeare. Aussi ne sut-elle que sourire d’un air entendu. Sur ce, ils se séparèrent.

    Qui est-il ? Pourquoi vient-il vivre en France dans ce coin perdu ? A-t-il une famille ? Depuis, ces questions la taraudent. Elle a hâte d’en apprendre davantage et surtout d’être sûre qu’il s’installera bientôt sur son palier.

     

    Comme sortie d’un long hivernage, Tatiana, l’ex-amie blogueuse, a surgit au téléphone plus tôt que notre voisine ne s’y attendait. Ne s’étaient-elles pas promis de se retrouver à Oléron au retour des beaux jours ? Prise de court, Alice hésite. Elle n’aime pas qu’on la presse. Elle cherche en vain une excuse pour se donner du temps. « Si, si. » Tatiana insiste pour qu’elles s’offrent un long week-end sur l’île. Après quelques tergiversations Alice cède enfin. Par ce temps, impossible de prétexter l’absence de chauffage dans sa minuscule villa. Et la voici occupée à remplir sa valise plus que pour une expédition au bout du monde ! Le lendemain, au petit matin, Claude Roux remarque la Mini Austin en train de franchir le portail. Elle partirait bien aussi !

    En milieu de matinée, au moment où elle ouvre la porte-fenêtre, Claude constate que le camion d’un marchand de meubles manœuvre pour se garer au pied du perron des Hermenier. Puis elle surprend un échange entre Adèle et le livreur. Ensuite, il y eut des bruits de portière claquée, de roulettes sur le goudron, d’objets posés lourdement sur le plancher, déplacés. Claude n’osa pas se pencher pour observer le mouvement au rez-de-chaussée.

    Après avoir réceptionné le mobilier, Adèle Hermenier décida de prendre un moment de repos dans son jardin. Soudain elle éprouvait de la lassitude. Demain elle mettrait de l’ordre avec l’aide de sa femme de ménage. A peine allongée sur son transat elle somnola. Son esprit flottait entre rêve et demi-concience. Des images de paysages ensoleillés se formaient et se fondaient dans une sorte de brouillard lumineux. Elle sursauta. Un bruit inhabituel l’avait sans doute sortie de sa torpeur. Elle regarda autour d’elle en clignant des paupières. Tout semblait normal. Elle referma les yeux et s’endormit.

     

    N.B. Ceci est une fiction

     

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