• Votre feuilleton du week-end : Le Salon de thé 36

     


    Votre salon du week-end : Le Salon de thé 36


    Semaine 36

     

    Le couvercle de nuages s’appesantit sur les têtes. Le vent qui fait danser sa jupe de trois sous autour des jambes de Claude brasse l’air moite sans le rafraîchir. Les ramages du tissu ondoient et lancent tour à tour des turquoise, des marine et des émeraude qui se mêlent, se démêlent sans fin et apeurent sont petit chien. L’orage rôde mais n’éclate pas.

    Votre salon du week-end : Le Salon de thé 36Derrière les jalousies de ses persiennes Aurélie Tchang l’observe, la main posée sur son ventre encore plat. Le soleil qui réapparaît illumine d’une aura dorée les bords de sa chevelure. Cette épidémie de coquetterie chez les dames d’âge mûr l’amuse. Elle jette de la couleur là où les habits ternes étaient de mise. Les archéologues remontent de leur chantier. Ils vont prendre un verre chez Adèle H. et gloser sur leurs dernières investigations.

    Dans le dos d’Aurélie Tchang la radio débite sans fin des reportages sur les Twin Towers à la veille du 11 septembre. Claude rentre tout juste dans son appartement. Après qu’elle a détaché la laisse de Varech, elle tourne le bouton sur la même station.

     

    Le 11 septembre 2001, qui l’aurait oublié ? Claude avait tout juste reçu sa deuxième chimiothérapie. Elle se sentait mal, nauséeuse, lasse ; elle arrachait ses cheveux par poignées. Elle ne possédait alors ni télévision ni internet, mais son poste de radio allumé en permanence émettait un bourdonnement familier, comme une présence amicale.

    Au milieu de l’après-midi il y avait eu l’annonce sibylline de la collision d’un avion contre un gratte-ciel à New York –sans doute un avion de tourisme égaré au-dessus de la métropole. Un accident. L’émission s’était poursuivie.

    Une heure plus tard, presque aussi brièvement le présentateur révélait qu’un deuxième avion avait heurté sa tour jumelle. Il ne pouvait plus s’agir de hasard. Les journalistes commençaient à s’agiter. Au fil des informations la tension montait. Claude s’était alors empressée de téléphoner à son père :

    —            Il se passe quelque chose aux Etats-Unis. Quelque chose de grave ! Ouvre ton poste de télé. L’Amérique subit une attaque !

    Son père avait répondu par un soupir mou. Il devait croire qu’elle dramatisait à outrance…

    Le flux des informations s’emballa. Toutes les émissions en cours s’interrompirent au profit de l’actualité immédiate. La direction de la station de radio se joignit aux journalistes et aux experts sur le plateau. L’heure était grave et le ton de circonstance. L’Amérique vacillait et la vieille Europe avec elle. On intima l’ordre à TOUS les avions de ligne sur le territoire des USA de se poser sur l’aéroport le plus proche. Combien étaient détournés ? Lesquels allaient se précipiter sur quelles cibles ?  Ce furent plusieurs heures d’effroi pour l’Occident. On vit l’Amérique anéantie, Washington rasée, les centrales nucléaires éventrées et leur poison invisible disséminé à travers le continent. On imagina notre civilisation détruite, l’empire brisé, le monde émietté en centaines d’états rivaux.

    Le père de Claude l’avait rappelée pour lui décrire les images terribles des tours en feu, de ces hommes et de ces femmes prisonniers des derniers étages qui agitaient des tissus blancs afin que les sauveteurs les repèrent. L’espoir perdu de les en délivrer. L’issue fatale inéluctable. Puis il lui avait raconté ceux qui se jetaient dans le vide, seuls, ou bien par grappes, main dans la main. La mort. Rien que la mort pour avenir. Et pour finir, les tours qui s’effondraient au milieu de la panique générale.

     

    Sur le moment Claude avait cru que l’humanité en serait changée, qu’elle se tournerait vers des valeurs plus humaines. Mais non, la stupéfaction et le deuil surmontés, la société avait repris son ordre antérieur, celui qui privilégie la force et le profit au détriment des peuples.

     

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  • Commentaires

    2
    margareth Profil de margareth
    Dimanche 18 Septembre 2011 à 08:15

    Oui Mony, j'aurais dû en effet laisser ma nouvelle adresse sur mon ancien blog. Je l'ai importé dans la précipitation parce que depuis quelques jours je n'arrivais presque plus à naviguer dans mon administration (et aucune réponse d'ob). J'ai eu peur qu'elle soit tout à coup complètement bloquée et que je ne puisse plus rien faire. L'essentiel est que nous ne nous perdions pas de vue

     

    1
    Samedi 17 Septembre 2011 à 19:59

    Vous voilà donc sur une autre plateforme. Dommage que vous avez supprimé votre ancien blog. Vous auriez pu mettre un dernier article aven un lien vers votre nouel blog. Pas de risque de cette manière de perdre des lecteurs en route. Mais bon, moi, j'ai votre nouvelle adresse, c'est l'essentiel. (merci dailleurs pour votre mail).


    je vous sohaite un bon WE.


    Amicalement

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