• Le blog de la voisine (base)

     

     

    6 avril 2010

     

    A l’occasion du week-end de Pâques des amis m’ont invitée chez eux à Saumur, ville du célèbre Cadre Noir. Samedi matin, entre deux giboulées, nous sommes partis ensemble faire le marché place Saint Pierre, du nom de l’église éponyme, cachée sous ses échafaudages car elle menace ruine. De part et d’autre, de hautes maisons à colombages, superbement entretenues, encadrent d’étroites venelles qui se faufilent entre les immeubles. Elles laissent à penser que le Saumur du Moyen Age, resserré entre ses murailles, devait être assez triste. Mais il y avait cette échappée du côté de la Loire, fleuve majestueux et indomptable, tantôt asséché jusqu’au sable, tantôt large, royal, roulant ses eaux immenses bien au-delà de ses rives. Pendant des siècles il fût une voie importante du trafic de marchandises. Sur les quais nous pouvons encore observer quelques maisons de mariniers. Mais la pluie mêlée de grésil a vite interrompu notre promenade. Cette année le dicton bien connu aura des rimes très riches : Noël au tison, Pâques au tison !

    Notre deuxième sortie devait nous conduire jusqu’aux Ardillers. Malheureusement en cours de route une glissade malencontreuse sur une plaque de boue m’a fait boitiller jusqu’à la fin de mon séjour. Nous avons dû rebrousser chemin car la douleur au genou était trop vive. Au retour mes hôtes m’ont proposé d’utiliser leur ordinateur, sans restriction, si je souhaitais consulter internet. Comme ces fumeurs à peine repentis qui cèdent à la première cigarette offerte avec insistance, je n’ai pas su dire non.

    Mamoureuse a réapparu sans fournir d’explications quant à son éclipse. Claude s’inquiète de mon sort et m’informe qu’il délaissera son blog quelques jours parce que sa famille débarque. Lucullus s’absente pendant la prochaine quinzaine sans avoir oublié, au préalable, de nous concocter un somptueux repas pascal. Scouttoujours est immobilisé avec une grosse entorse à la cheville. C.S-qui nous présente un blanc-manger aux pommes caramélisées. L’illustration est alléchante et la recette facile à réaliser. Tatiana m’annonce son séjour à Oléron et promet des photos. D’autres blogueurs me souhaitent un prompt rétablissement dans l’éventualité où ma disparition subite serait liée à un problème de santé. A les lire il me semble retrouver une famille qui m’aime et se languit de moi. Je ne peux quand même pas les quitter sans un au revoir au risque de leur laisser ainsi le goût amer de la trahison.

    J’aviserai en rentrant. Au pire je pourrais prévoir une explication en réponse à leurs commentaires si je décidais de dire adieu à la blogosphère…

    Certains jeunes évoluent d’une façon très favorable en peu d’années.  Il y a cinq ans la benjamine de mes amis était une adolescente acariâtre, désagréable au possible, « en rébellion constante », disait sa mère. Qui reconnaîtrait la gamine ingrate dans la jeune fille épanouie et avenante d’aujourd’hui ?

    Pâques s’était levé radieux. Ce qui nous permit d’entreprendre une courte promenade  pédestre au bord de la Loire, sur la piste cyclable qui la longe. Elise me donnait le bras afin d’atténuer ma claudication. Nous avons beaucoup parlé tout en marchant et sa conversation ne manquait pas d’intérêt. Elle a profité de notre sortie pour cueillir pâquerettes et violettes qui ornaient la table du déjeuner.

    Lundi je suis repartie sous le ciel bleu lavé de tout nuage, à travers la campagne verdissante. Quel plaisir de rouler sous le soleil, en direction des beaux jours ! Fini le triste hiver !

     

    7 avril 2010

     

    Que manigance le fils du rez-de-chaussée ? Depuis le début de la matinée il remplit une camionnette. J’espère qu’il ne dévalise pas l’appartement de ses parents en leur absence…

     

    8 avril 2010

     

    Racheter ou ne pas racheter un ordinateur ? Je ne vais tout de même pas jouer ma décision à pile ou face ! Ce serait puéril.

     

    N.B. Ceci n’est pas un journal intime mais une fiction.

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  • Le blog de la voisine (base)

     

    29 mars 2010

     

    Samedi matin en faisant mon marché j’ai croisé  madame du rez-de-chaussée, alias Lucullus, qui tirait un caddie duquel s’échappait une gerbe de poireaux. Toujours aussi exubérante, elle m’a abordée. Au moment où nous allions nous séparer elle m’a retenue un instant :

    — Savez-vous que j’organise de temps à autre des soirées de dégustation ? Bien entendu je demande une modeste participation, inférieure au prix d’un repas au restaurant. De surcroît je donne des conseils pour l’organisation de  vos dîners et réceptions. Cela se passe en petit comité. Vous devriez vous joindre à nous la prochaine fois. Si vous aviez internet je vous aurais abonnée à ma newsletter. Mais je vous préviendrai de mes réunions à venir. A bientôt !

    Aurais-je une tête à  être incapable d’utiliser le Web ?

     

    31 mars 2010

     

    C’était à prévoir ! Mon ordinateur a rendu l’âme. Pourvu que mes fidèles blogueurs ne m’abandonnent pas ! Mais au fond je ne suis pas sûre d’en être aussi contrariée. Ce matin je me suis levée de fort bonne humeur, comme libérée d’une addiction. Depuis plusieurs semaines je ne regardais plus le monde qu’à travers un objectif ou un écran. Soudain je réalise que le printemps s’installe. Le soleil joue à travers les feuilles de l’azalée, s’écoule de l’accoudoir à l’assise de mon fauteuil. Et l’envie me prend de flâner à travers les rues. Tout à coup je me sens jeune, pleine d’énergie. Ah, les beaux jours ! Ah, la VRAIE vie !

     

    1er avril 2010

     

    Tout en discutant, notre voisine du premier étage m’a avoué qu’elle a soixante ans et qu’elle vient de prendre sa retraite. Je lui en donnais presque dix de plus. A moins que je ne me fasse des illusions sur mon propre physique. Cependant, le fait qu’elle garde ses cheveux blancs et qu’elle soit un peu voûtée renforce sans doute cette impression de vieillesse…

    … hélas ! Les miroirs sont cruels !... quand on chausse ses lunettes pour se regarder en face. Si je conserve encore des formes assez féminines, l’ensemble a tendance à s’affaisser et à se friper. Triste constat…

     

    2 avril 2010

     

    J’hésite encore à remplacer mon ordinateur, tiraillée entre mon indépendance nouvelle et la curiosité de connaître les réactions de mes visiteurs à ma disparition subite. Pour certains ce n’est peut-être qu’une visite de moins à rendre ; pour d’autres, un facteur de baisse de cet odieux blog rank auquel nous sommes tentés de sacrifier ; et puis il y a les véritables amitiés, mêmes si elles ne sont que virtuelles, de celles qui lièrent Montaigne à La Boétie, inexplicables (« parce que c’était lui, parce que c’était moi ») mais puissantes, indéfectibles.  Il faut aussi prendre en considération le coût de l’investissement (« du gouffre », corrigerait mon deuxième beau-frère). Certes, à la belle saison internet peu paraître superflu. Mais en hiver, quand le jour n’en fini pas de se lever et que la nuit tombe trop tôt, il devient une agréable distraction.

    Marine est toujours de ce monde ! Tant mieux ! Elle est sortie de sa torpeur pour s’enquérir de ma santé parce que mon blog reste muet ! A quoi nous mène la blogosphère. Nous ne nous parlons plus. Nous communiquons (la trouvaille du siècle) par médias interposés. Le Web entretient l’illusion d’être entourés de dizaines, parfois de centaines d’amis. Mais au moindre bug ces relations à la limite du réel s’évanouissent comme le génie de la lampe d’Aladin. Et nous retombons dans la réalité, étonnés qu’elle existe encore.


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  • Le blog de la voisine (base)


    21 mars 2010

     

    Mon article est prêt, illustré par les vues de l’été suivant, un peu plus originales que les premières qui se résumaient à une succession de plages uniformes. J’avais un nouvel appareil qui me permettait de mieux cadrer mes sujets et me donna le goût de les varier : cabanes d’ostréiculteurs, bateaux dans le port de Boyardville et des villas de différentes époques et de tous styles. Pourtant je disposais de peu de loisirs car j’avais accepté un travail de vendeuse en librairie durant les vacances universitaires. Des messieurs revenaient me féliciter pour mes choix littéraires.  La libraire s’en amusait et me disait  « eh bien ! Alice, eh bien ! » d’un air entendu, comme si elle me soupçonnait de faire du charme à ses clients. Je ne retrouvais plus mes amis qu’une fois ou deux par semaine.

    Bien des choses avaient changé en une seule année. A la stupéfaction générale nous apprîmes le mariage précipité de Marie-Elisabeth pendant l’hiver. Ce qui fit jaser dans notre Landerneau. Elle promenait sans complexe son bébé joufflu et gazouilleur. Elle avait abandonné notre cercle pour celui des adultes et se contentait de nous saluer de loin en loin.  La sœur de Valentin venait de se fiancer au futur notaire. Par chance ma cousine Sylvie séjournait en Afrique dans un dispensaire de brousse avec plusieurs élèves infirmières de sa promotion. Cela amortirait le choc… Valentin, nouveau bachelier, allait entrer dans l’agence bancaire de son oncle. Imaginez Richard Berry derrière un comptoir ! Quelle surprise ! Je l’aurais davantage vu marin ou grand reporter. Libre voyageur.  Il paraissait toutefois satisfait de son sort futur.  Dorénavant nous avions tous quitté le système scolaire, que nous soyons étudiants ou nouveaux salariés.

    (Il y a dix ans j’ai appris par hasard la mort de Valentin, toujours célibataire. Est-ce que… Non, ce doute est ridicule. Depuis tant d’années il devait m’avoir oubliée lui aussi.)

     

    25 mars 2010

     

    Une fois n’est pas coutume, je me suis rendue à la bibliothèque municipale dans l’intention de feuilleter diverses revues. Depuis des années tout ce qui est intellectuel me rebute. C’est pourquoi je me cantonne à quelques magazines féminins, voire aux bandes dessinées. Il s’agit surtout de passer un agréable moment dans le calme et de me distraire au spectacle des lecteurs. Notre voisine du premier étage était installée à une table entre les sections histoire, géographie et linguistique. Elle remplissait les feuillets d’un calepin au milieu de volumes ouverts étalés autour d’elle, si absorbée par son étude qu’elle ne m’a pas remarquée. Là, je l’ai découverte sous un jour nouveau. Jusqu’ici je lui attribuais pour seules occupations son chien et sa popote. Comme quoi les apparences sont parfois trompeuses.

     

    N.B. Ceci n’est pas un journal intime mais une fiction.

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