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    Le blog de la voisine (base)

     

     

    10 juillet 2010

     

    Le récriminateur passe de plus en plus tôt. Il jette ses cris comme une malédiction vers le ciel. « Ah ! Monsieur ! Ah ! Vous avez voulu me prendre ma femme ! Eh bien, Monsieur… » Ses vociférations se perdent au loin sur la route en même temps que sa silhouette malingre. Un fou. Prisonnier de sa rébellion.

    La chaleur nous assomme tous. Il n’y a plus un bruit derrière les volets clos et les stores baissés. Comment font les peuples sous les tropiques pour vivre et travailler dans la moiteur continue ?

    Les blogs tournent au ralenti. Les visiteurs se raréfient. Le découragement guette ceux qui restent. C’est l’été. La morte saison pour nous qui ne partons pas. Mes seuls voyages seront pour le centre anticancéreux. Comme un chemin de croix interminable.

     

    13 juillet 2010

     

    La liste de mes favoris est brève : taratata, parce que j’en connaissais l’auteur ; Parteutatis, spécialiste des mythologies celtes et scandinaves, pour ne pas sombrer dans le ridicule avec la précédente. Je n’aime pas les entraves. Je préfère vaquer à mon gré dans les domaines qui m’attirent, m’arrêter à un article et non m’astreindre à des visites régulières dont la plupart seront d’un intérêt discutable.

     

    14 juillet 2010

     

    Débarquement de deux garçons chez le jeune infirmier du second. Frères ou amis…

    La fête nationale a réveillé tous les habitants du rez-de-chaussée à l’heure du feu d’artifice. On rit, on applaudit, on s’exclame à chaque pétarade. Mon petit Varech apeuré s’est réfugié sous la chaise, entre mon lit et le mur.

     

    15 juillet 2010

     

    La bibliothèque est désertée. Elle fermera bientôt. Quel sujet aborder ? Le vide estival ne m’inspire guère.

    Si je faisais dans l’autobiographie ? Bien que j’y répugne.  C’est en fait la raison d’être d’un grand nombre de blogs. Pas question de m’embarquer dans une rétrospective pleurnicharde. Je me concentrerai sur une période disons, « historique ». Par exemple les années passées dans la mercerie d’une tante de mon père, Athalie, dite tante Thata. Les références au passé récent intéressent beaucoup de lecteurs. Chacun y retrouve plus ou moins un épisode de sa vie ou de celle d’un aïeul. Le petit commerce était florissant. Il ne connaissait ni l’informatique ni les blisters.

    Oui, mes parents m’ont placée en apprentissage chez tante Thata à quinze ans, aussitôt mon BEPC obtenu. Mon père possédait une quincaillerie très bien achalandée, du côté du Puy-en-Velay. Il jugeait les études secondaires superflues pour la fille d’un commerçant aisé. La prospérité de sa famille garantissait sa sécurité matérielle. Tante Thata, vieille demoiselle figée dans le souvenir d’un lointain amour platonique, fut trop contente de prendre l’une de ses petites-nièces sous son aile.

    Mais je ne songeais qu’aux études.

    Dix années plus tard je me présentais au baccalauréat. Je l’avais préparé seule, dans le secret de mes nuits. Je quittai alors tante Thata pour m’inscrire à l’université de Clermont-Ferrand, en sciences humaines. Mes économies épuisées, il ne me restait plus pour (sur)vivre qu’à exercer une succession de petits métiers sans gloire. Diplômée à trente ans, l’étiquette « autodidacte » m’a poursuivie. Les portes se refermaient, y compris –et surtout-, celles de l’enseignement. Avez-vous élevé trois enfants ? Non. C’était le sésame. Lasse de trimer, je suis retournée près de tante Thata.

    Elle promettait de me céder sa boutique. Un jour. Mais à quatre-vingt-douze ans, encore  bon pied, bon œil, elle tenait toujours ferme la barre. Peu à peu les premiers supermarchés grignotaient sa clientèle. Mon père avait pris sa retraite avant que sa quincaillerie ne coule tout à fait. Mes deux frères étaient cadres dans de grandes surfaces. Et moi je partais à la dérive.

    J’ai fini par accepter un poste d’employée de bureau dans l’usine de l’un de nos fournisseurs, loin de mon Velay natal.

     

    N.B.Ceci n'est pas un journal intime, mais une pure fiction.

     

     

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    Le blog de la voisine (base)

     

     

    4 juillet 2010

     

    Je pensais qu’avec deux femmes au rez-de-chaussée notre tranquillité était acquise. Funeste erreur ! Leur famille a débarqué au milieu de la nuit. Rires en cascade. Portières claquées. Et notre sommeil vole en éclats. Et les angoisses nocturnes se ravivent. Ce sifflement dans ma poitrine. Mon cœur s’affole à en mourir. Non point que cette perspective m’effraie ; mais que deviendrait mon petit Varech seul dans l’appartement ? Combien de jours s’écouleraient avant que quiconque ne remarque ses va-et-vient à la fenêtre ou ses timides aboiements ? Car il se manifeste peu. Y aurait-il une personne de confiance pour le recueillir et le soigner comme je le fais ?

     

    6 juillet 2010

     

    Beaucoup d’animation depuis trois jours. Les neveux H. se sont répandus à travers le jardin en terrasses attenant à leur appartement. Par chance ils font la grasse matinée et la sieste. En soirée les enfants répètent leurs leçons de violon sous la férule de leur père. Intransigeant. Il va les dégoûter de la musique. Que mes oreilles souffrent ! Les plus jeunes tournent autour de Varech. Mais il se méfie de leurs gestes imprévisibles.

    Je vais essayer de trouver un peu de tranquillité dans le jardin public à deux pas d’ici. Ce sera l’occasion de me replonger dans ce vieil Hérodote que je néglige depuis belle lurette.

    19 h – Autant de mouvement dans le petit square qu’ici. Cela rit, piaille, court en tous sens, à vous donner le vertige, alors que personne ne le fréquente les neuf dixièmes du temps. Il était impossible de se concentrer. Il ne me restait donc plus qu’à me divertir des jeux enfantins.

     

    7 juillet 2010

     

    Melle H. aurait l’intention d’acheter l’appartement qu’elle loue, m’a affirmé le bavard d’en face.

     

    8 juillet 2010

     

    Hérodote écrit : « [Artabane]… s’étant aperçu que XerXès pleurait lui tint ce langage : «  Ô roi ! Comme soudain tu diffères de toi-même ! Après t’être à l’instant estimé heureux, voici que tu pleures ? » L’autre répondit : « Il est véritable qu’il m’est venu au cœur une compassion grande en pensant combien est brève toute existence humaine, puisque de tous ceux-là qui sont si nombreux [les soldats de son armée –NDL], nul ne vivra dans cent ans. » (Les histoires XLVI)

    Sur qui s’épanchait ce roi cruel et sanguinaire qui ne cessa de répandre la mort autour de lui au Ve siècle avant JC ? Sans doute davantage sur sa destinée et le monde auquel il était attaché que sur celle des milliers d’hommes qu’il n’hésita pas à sacrifier à sa gloire et à son ambition. Il est probable que Xerxès venait, dans une fulgurance, de prendre conscience de la vanité de toute entreprise humaine. Le temps abolit tout. La poussière se mêle à la poussière. Après des siècles, le sang des ennemis d’hier s’unit dans leur descendance. Celui du maître se confond avec celui de l’esclave à l’insu de leur postérité, noyés au milieu de nos ancêtres innombrables. La famille est un leurre, une succession de liens fugitifs que le hasard des rencontres ou des us noue et dénoue au fil des générations...

    16 h – Mignon. La sonnette retentit. Derrière ma porte se tient l’un des petits-neveux, droit comme un piquet, un peu embarrassé. Puis, hardi soudain : «  Il est où ton monsieur, madame ? » au moment où sa mère débouche, le souffle coupé :  « Nicolas ! Cela ne se fait pas ! Excusez-nous madame. »

    En vérité je soupçonne Nicolas d’avoir inventé ce prétexte pour voir mon chien ! ;o)

     

    N.B. ceci n'est pas un journal intime mais une pure fiction

     

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    Le blog de la voisine (base)

     

     

    ...à moins qu’une voisine de notre voisine n’ait elle aussi un œil derrière sa fenêtre et peut-être un autre fixé sur la lucarne de son écran. Penchons-nous un moment sur son journal ; scrutons ses pensées, écoutons ses réflexions…

     

    24 juin 2010

     

    Taratata ne claironnera plus de l’été. De bon matin je l’ai vue charger l’arrière de sa Mini-Austin et franchir le portail d’entrée. La dame est bien conservée. Qui croirait que nous avons le même âge ? De loin elle porte quarante ans. Certes, de près l’illusion s’estompe. Mais elle veille à préserver une allure jeune et moderne. Chic sport. Sans doute est-elle issue d’un milieu aisé. Elle n’a pas dû traverser trop d’épreuves dans sa vie.

    Madame ou mademoiselle ? La question était courante dans ma jeunesse. Depuis trois ans que nous cohabitons, je n’en sais toujours rien. Pourtant, d’un naturel affable, elle n’hésite pas à nous accoster pour échanger quelques mots. A vrai dire, elle parle beaucoup pour peu de choses. Sa conversation se limite en général aux lieux communs d’usage : le temps et les minables embrouilles de voisinage. Elle est gentille. C’est déjà une qualité appréciable.

    Son blog est à son image, charmant et vide. Elle y publie des photos sans grand intérêt. Des clichés pris à l’occasion des vacances. On visionne son site comme on feuillette un album de famille, la larme à l’œil au souvenir de la tante Amélie, du cousin Gaston ou des étés à Pornichet. Peu de texte. Le plus souvent elle se contente d’afficher des titres.

    J’ai quand même beaucoup ri quelquefois en reconnaissant les chats errants du quartier ! Et ces noms dont elle les a affublés ! Et mon petit Varech en train d’embrasser le gros matou gris qui traîne dans les parages ! Pour son retour je lui réserve une surprise par blog interposé…

    A quoi remplit-elle son temps ? Au shopping, aux bavardages entre copines à la terrasse des bars. Je la crois plutôt frivole. Parfois elle rentre chargée de sacs estampillés au logo de grandes marques. Ma foi, si ses moyens le lui permettent, pourquoi pas ?

    C’est surprenant, en six mois d’échanges quasi-quotidiens, elle n’a toujours pas fait la relation entre CLAUDE et moi-même. A plusieurs reprises je lui ai tendu la perche dans mes commentaires. De plus mon nom est inscrit en toutes lettres sur ma sonnette : Claude R.

    Varech me fait les yeux doux. Ce qui signifie : « Promenade, maîtresse ! » Allons-y donc !

     

    28 juin 2010

     

    Varech avance à pas comptés. Il me fatigue davantage que s’il tirait sur sa laisse. Je finis par appréhender les heures de sortie.

     

    1er juillet 2010

     

    Madame et Mademoiselle H. ont quitté leurs pénates pour l’appartement vide du rez-de-chaussée. Cette malheureuse Madame H. n’aura plus à descendre notre interminable escalier de réception ; juste les cinq marches du perron.

     

    2 juillet 2010

     

    Comment avons-nous fait connaissance via internet ? Je ne me le rappelle pas. Sûrement au hasard de la navigation. Laquelle de nous deux a d’abord pris contact avec l’autre ?  Je ne le sais plus. Quoi qu’il en soit, nos échanges ont malgré tout un côté sympathique. Si j’allais faire un tour chez ses favoris ?

    Voyons cela… Lucullus, Arts de la table et du jardin. Là nous évoluons dans Amour, Richesse et Gloire ! Elle doit être dans son élément. Aucun article n’a été publié depuis trois  mois bien que le nombre de commentaires dénote le succès. Son administrateur a dû jeter l’éponge, las des contraintes liées aux publications régulières.

    Mamoureuse. Que de chats ! Que de chats ! Et un ou deux yorkshires qui montrent le bout de leur museau ici et là. Taratata aime tant les félins (au point de les photographier dans la rue !) qu’elle doit être aux anges !

    CS-qui. Le spécialiste de la cuisine spartiate. Etonnant !

    Scouttoujours. Éternel randonneur qui sillonne le réseau de nos sentiers. Je ne l’imagine guère fréquenter ce type d’homme.

    Tatiana. Que nous réserve ce doux nom ? La demoiselle gère un joli blog. Ses photos de paysages maritimes dévoilent une rare sensibilité. Si ce n’est pas de l’art, nous en approchons.

    Moi,moi, encore moi. Je ne connais pas plus narcissique. C’est le journal d’une gamine préoccupée de ses seules conquêtes masculines. Comment Taratata peut-elle s’intéresser à des papotages aussi puérils ?

     

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